20 mai 2019
Vers la rénovation active des immeubles d’habitation ?
La défense publique de la thèse de doctorat présentée par Sergi Aguacil Moreno a eu lieu le 15 mai dernier à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). Réalisé sous la supervision du Prof. Emmanuel Rey au sein du Laboratoire d’architecture et technologies durables (LAST), ce travail a été mené dans le cadre du projet de recherche interdisciplinaire ACTIVE INTERFACES, soutenu par le Programme national de recherche "Virage énergétique" (PNR 70) du Fonds national suisse (FNS). La recherche porte sur l’étude des stratégies architecturales pour l’intégration du photovoltaïque dans les processus de rénovation des bâtiments d’habitation.
Les villes de demain sont déjà en grande partie construites étant donné qu’une large part du parc bâti actuel – caractérisée par une faible performance énergétique – sera toujours debout en 2050. Les processus de renouvellement urbain jouent donc un rôle essentiel en vue de la transition durable des villes européennes. Dans ce contexte, les installations photovoltaïques intégrées au bâtiment (BIPV) ont le potentiel de contribuer de façon importante à l’atteinte des objectifs actuels et futurs de demande énergétique et d'empreinte carbone, issus du concept suisse de la Société à 2'000 Watts. Le BIPV présente également un potentiel pour l'accomplissement du virage énergétique pour 2050.
Fonctionnant à la fois comme matériau d'enveloppe et comme générateur d'électricité, le BIPV permet simultanément un recours réduit aux combustibles fossiles et une limitation des émissions de gaz à effet de serre, tout en assurant de réaliser des économies matérielles (matériaux de construction) et financières (coût de l'électricité). Ces effets positifs sont compatibles avec les objectifs de la majorité des directives énergétiques européennes appliquées au bâtiment (zéro-énergie, énergie positive, etc.). Cependant, malgré les progrès technologiques et la baisse continue des coûts, la pratique courante a tendance à sous-estimer les atouts du BIPV. Divers obstacles liés notamment à la technologie employée, à la faible demande (induisant un faible volume de production de produits BIPV) et au manque d'information et d'exemples de projets de rénovation de qualité, maintiennent les coûts à un niveau élevé et limitent l'acceptabilité des solutions BIPV. En intégrant le BIPV au sein du processus de conception, par l'intermédiaire d'une approche spécifique par étude de cas, cette thèse vise à apporter un support aux acteurs impliqués dans des projets de rénovation, en particulier aux architectes.
L'approche, concentrée sur l'intégration architecturale du BIPV dans les projets de rénovation des bâtiments résidentiels, se décline en quatre phases : (1) l'identification de situations archétypiques par l'analyse du parc immobilier, (2) l'analyse détaillée de cas d'étude réels, (3) le développement de scénarios de rénovation architecturale intégrant différentes stratégies BIPV, et (4) l'évaluation multicritère de chaque scénario. Les contributions de cette thèse sont de deux ordres. D'une part, afin de promouvoir l'intégration du BIPV dans les processus de renouvellement urbain, un ensemble de stratégies de design est défini et illustré au travers de cas d'étude réels. Celui-ci intègre : (i) des stratégies passives visant à améliorer l'enveloppe par le recours à des matériaux et systèmes constructifs à faible énergie grise, (ii) des stratégies BIPV, faisant usage de produits photovoltaïques innovants comme nouveau matériau pour les façades et les toitures, et (iii) des stratégies actives visant à améliorer l’efficience des installations BIPV par l’adaptation des systèmes techniques (chauffage, eau chaude sanitaire et ventilation) afin d’assurer la rentabilité des investissements et de réduire la dépendance aux subventions.
D’autre part, la seconde contribution majeure est le développement d’une méthodologie d’évaluation multicritère pour comparer les différents scénarios d’intervention, à travers une approche qualitative et quantitative. Le processus d’évaluation proposé permet ainsi de comparer les alternatives de design selon des critères énergétiques (performance du BIPV, bilan en énergie finale, analyse du cycle de vie) et économiques (analyse des coûts du processus complet de rénovation). Cette approche doit fournir aux architectes et ingénieurs des stratégies de rénovation BIPV avancées dépendantes de la typologie de bâtiment, des objectifs de design architectural et du niveau d’intervention, afin de supporter ces acteurs sur la voie d’un environnement urbain faible en carbone.